Chef Chaudart a écrit:Sur le témoignage de Keitel, voir le message d'Eric Denis ici
http://atf40.forumculture.net/t5059p150 ... haltbefehl Mais cela est secondaire : ce que je veux dire c'est que la situation stratégique divise deux camps. Halder et Brauchitsch d'un côté, Hitler et sa clique de l'autre. Si vous taxez Hitler d'un tel excès de prudence que cela doit forcément cacher d'autres motifs que militaires, il est parfaitement envisageable qu'à l'inverse, les premiers fassent preuve d'un optimisme excessif. Rien ne dit en effet que les troupes mobiles, si elles avaient continué sur Dunkerque, même si on écarte la possibilité d’une contre-attaque alliée, ne se soient pas retrouvées usées et dans un dispositif inadapté face à une résistance raidie des Alliés, avec de fortes pertes, particulièrement en Panzer, à la clé. Tout cela pour un objectif (Dunkerque) qui, à ce moment,
n’a rien de stratégique, je le rappelle (et j’insiste !). Halder ne dit pas autre chose dans son Journal : la décision hitlérienne aura pour conséquence… de simplement retarder la réduction de la poche (avec plus de pertes humaines, ce dont Hitler a toujours montré qu’il se contrefiche).
Il n’indique absolument pas que cela laisse une porte de sortie aux assiégés. On peut également supposer que la colère d'Halder et de son chef soit due, au moins en partie, à un problème d'égo, la vexation qu'un "Caporal de Bohème" se permette de remettre en cause des décisions qui LEUR appartiennent, plus qu’à un problème militaire.
Ce que vous taxez de décision stupide peut parfaitement être jugée comme simplement prudente.
J'entends bien, et pour info: non, je n'écris pas que Hitler, le 24 mai, entendait laisser fuir les Britanniques. Cependant, deux remarques me viennent à l'esprit:
1/ L'hypothèse d'une évacuation alliée de la poche par voie maritime n'est pas absente des calculs du haut-commandement allemand, comme l'atteste cet extrait de la directive 13 du
Führer en date du 24 mai 1940:
"La mission de l'armée de l'air consistera à briser toute résistance ennemie des forces encerclées, à faire obstacle à toute évacuation des forces britanniques à travers la Manche, et à protéger le flanc sud du Groupe d'Armées A". En toute hypothèse, foncer sur Dunkerque présente au moins le mérite de réduire la poche alliée, de la couper de toute possibilité de ravitaillement maritime, bref, vu la débâcle des Alliés, les conduire tout simplement à se rendre à court délai.
2/ Si je te suis (corrige-moi si je me trompe), Hitler prend la décision de stopper indéfiniment ses blindés, contre l'avis de tous ses généraux, tant ceux des bureaux que ceux sur le terrain, parce qu'il s'inquiète de leur usure après quatorze jours de campagne. Dont acte, mais ce n'est pas cohérent avec la mission dévolue à la
Luftwaffe, laquelle a également souffert ces deux dernières semaines, et se voit confier une tâche excédant manifestement ses capacités. Sans parler des autres formations terrestres, les blindés du Groupe d'Armées A, et plus globalement les pauvres fantassins.
Encore une fois, il y a eu inversion du « marteau » et de « l’enclume ». Sur décision hitlérienne. L’offensive, sur ce front, n’est plus à l’ordre du jour ! Pas complètement à tort, en plus : dès le 25, les Alliés ont commencé à renforcer leurs défenses, le 26, le dispositif est suffisamment solide pour probablement résister aux Panzer. Plus qu’une contre -offensive, ce que doivent craindre les Allemands c’est de se casser les dents en attaquant ! Et je martèle que ces deux jours DUNKERQUE N’A ENCORE AUCUNE IMPORTANCE STRATEGIQUE !
1/ Dunkerque présente une importance stratégique cruciale, pour les raisons que j'évoque ci-dessus: s'en emparer, c'est priver la poche de toute possibilité de ravitaillement/évacuation via la Manche. Prendre Dunkerque, c'est porter le coup de grâce aux Alliés.
2/ Hitler fait stopper ses chars le 24 parce qu'il redoute un excès de souffrance de leur part, ce alors que personne ne le réclame... mais les autorise à reprendre l'offensive le 26, après avoir accordé aux Alliés deux jours pour
"renforcer leurs défenses", sachant que
"le dispositif est suffisamment solide pour probablement résister aux Panzer". Non sans, entre-temps, avoir aggravé l'état de la
Luftwaffe. Je ne peux pas imaginer Hitler aussi parfaitement crétin qu'il prenne des décisions aussi militairement absurdes. D'autant, j'y insiste, que pas un seul de ses généraux ne réclamait une pause de longue durée le 24 mai.
Je viendrais incidemment à l’aide des intervenants qui pensent que les divisions Panzer étaient usées, Loïc et Alain : on en a la preuve indirecte. Malgré la pause 24h ordonnée par von Rundstedt, la journée du 26 ou l’ordre d’arrêt est levé, donc 48h, le double de ce qui était prévu, les unités sont incapables de reprendre l’offensive immédiatement. On n’a pas procédé qu’à une simple vidange et un nettoyage des parebrises, c’est la majorité des Panzer qui est sur le flanc !
Mais comme le dit F.D., un bogue logique vicie le raisonnement: la situation du 26-27, date de la reprise, ne saurait être comparable avec celle du 24 au matin, dans la mesure où, entre-temps, et pour te citer, les Alliés ont gagné un répit de deux jours pour
"renforcer leurs défenses", sachant que
"le dispositif est suffisamment solide pour probablement résister aux Panzer". Pas étonnant, dans ces conditions, que les
Panzer triment - et pas qu'eux, d'ailleurs.
Je ne suis pas d’accord. Le fait que Hitler donne plusieurs explications différentes n’implique pas forcément qu’il ment. Comme indiqué plus haut, ce serait même plutôt le contraire : s’il voulait mentir, il préparerait et servirait un bon gros mensonge bien étayé, histoire de bien enfumer ses interlocuteurs. Ce n'est pas significatif, donc.
A mon avis, si. Hitler éprouve en effet le besoin de convaincre ses interlocteurs du bien-fondé de l'arrêt. Et selon le degré de conviction de certains devant ses bobards, il n'hésite pas à rajouter d'autre bobards pour enfoncer le clou (par ex.: les marécages flamands à l'
O.K.H., qui reste encore sceptique).